dimanche 24 juin 2007

Empreinte des chameaux : mystère des jeux de lumière

Cela fait maintenant huit heures que nous marchons. Sable dur, sable mou, notre pas s'adapte dans le désert de Libye. Les chameaux sont passés il y a quelques heures. Ils sont à peine visibles à quelques kilomètres. La caravane était pourtant partie bien après nous.

Les Touaregs les distinguent sur des distances considérables, comme tout infime mouvement. Nos yeux peu habitués restent de leur côté aveugles à ces nuances de vie presque imperceptibles.

Le sable en ce lieu marie les matières, des plus foncées aux plus claires. Teintes noires comme cette irruption volcanique il y a des millions d'années et dont les scories rongées par l'érosion ne sont que poussières. Teintes argentées comme ces multiples cristaux qui conjuguent les derniers rayons du soir.

Le chameau est passé. Il ne reste que la trace de son pas de croisière. Empreinte positive ou négative, un mystère des jeux de lumière.

lundi 18 juin 2007

Les colonnes jumelles d'Alexandrie

Ces deux colonnes sont là depuis un temps déjà oublié, fières, abîmées par les outrages du climat et les mains des passants. En des périodes moins glorieuses, elles étaient à terre, brisées. Puis les hommes les ont remontées sur leurs socles. Dans cet amphithéâtre déserté, depuis quelques siècles, elles dissertent ensemble sur la grande histoire de la ville d'Alexandrie. Jalousement elles gardent pour elles les secrets des alcoves.

Une femme, un homme s'offre la scène pour une discussion intime à l'abris des regards. Ils repondent en écho aux dialogues des pierres et de ces deux cyprès dans le prolongement de la perspective.

La courbe des gradins, dans un effet d'amplitude entoure les colonnes. C'est un peu comme si des géants venaient à l'instant de les planter sur l'eau. L'onde de choc se propage et s'ajoute aux bruissements des pièces tragiques antiques.
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Palette de reflets dans un étang de Marseille

Cette photo prise dans la campagne Pastré à Marseille, avec les troncs tortueux des pins parasols n'est pas sans rappeler le tableau du post précédent. Il y a quelques semaines j'étais impressionné et séduit par ces reflets des branches dans l'eau, la teinte pâle du ciel bleu de Provence, et cette palette des verts qui jonglent avec la couleur argentée des écorces des troncs.

Mémoire de forêt

Exercice de composition d'une jeune artiste lors de ses classes à l'Ecole Nationale des Arts Appliquées. Ces arbres décharnés, géants d'un temps, portent la mémoire du lieu. Ils restent singuliers ou se dédoublent comme les marcheurs de l'impossible.

Il y a dans le jeu des couleurs, dans la découverte de cette forêt inquiétante comme une atmosphère à la Tolkienne. Terre, air, feu, les mondes se superposent et alternent jusqu'à l'abstraction, avec comme seul trait d'union les branches des arbres.

Cette oeuvre fait partie d'une série de trois tableaux sur le même thème.
D'autres créations de l'artiste restent à découvrir sur son site internet "Visages d'Alexandrie".

Egypte : des murs racontent des histoires

Dédales des ruelles d'Alexandrie. Des murs racontent des histoires. Tel voyage à La Mecque à accomplir par tout bon musulman au cours de sa vie. Telle épopée d'un oasis aux pyramides de Gisé comme ici sans doute ?

L'élan distingué des caractères arabes décline les lettres bleutées sur un fond jaune atténué, presque brûlé par le soleil de Méditerranée. Les papiers superposés ne respectent en rien la composition et lui donne un côté un peu absent. Cette aventure bientôt disparaîtera grignotée par l'humidité du sol et camouflée par les colleurs d'affiches en période électorale.

Impression de rouille dans les docks

Le jeu aléatoire de la rouille sur le métal bleu dessine comme une peinture contemporaine.
Une barrière protège cet espace dégradé de la ville, tel le cadre d'un tableau.
Le monde ouvrier d'hier, dans l'immensité des docks de New-York, laisse dans ce métal qui s'abime comme un dernier témoignage éphémère d'une autre époque laborieuse.

Un rayon de soleil met un accent souriant sur ce palier d'un entrepôt. L'objet ne s'emporte pas mais la photo saisit l'instant dans la liberté des accents de l'oxydation.

dimanche 17 juin 2007

Au delà des peintures : une terrasse gourmande


Quand on ne s'abandonne pas aux joies de la collection sur d'autres rives lointaines, rien ne vaut un peu de jardinage en terrasse pour se reconcilier avec la nature.
Un jardin gourmand avec quelques framboisiers, un jeune figuier, des groseilles à maquereaux, des tomates cerise en devenir, l'arbre argenté de Provence qui cette année encore donnera des olives...

Un ami me disait qu'une terrasse n'avait rien à voir avec un jardin. Au sol, en connexion avec la terre les arbres communiquent avec les forces télluriques, et de leurs vibrations transmettent cette résonance aux hommes. Il lui arrivait souvent d'ailleurs d'embrasser les arbres...

Alors que la terrasse est comme suspendue, déconnectée du sol, de la puissance minérale. Un peu comme un accomplissement de la maîtrise de l'homme sur la nature. Mettre en pôt, conditionner, suspendre la nature. C'était un peu comme l'orgueil inouï des Babyloniens avec les jardins suspendus. Le summun pour affirmer la tout puissance de l'homme et son affranchissement de mère nature. Ils n'étaient d'ailleurs probablement pas à Babylone mais bien plus certainement à Ninive.

Ah, partir quelques jours et revenir impatient de découvrir les fruits du jardin, les grappes de Muscat de Hambourg presque à maturité. Une terrasse comme un petit verger, s'avère au fil des saisons comme un espace privilégié d'évasion et de retrouvailles.

Dons son coin, un petit bonzaï plein d'espoir évoque les pentes des Alpes de Hautes Provence. Ce tortueux mélèze avait été épargné par les troupeaux en transhumance, grignotant chaque été les jeunes pousses avec délice. Plus au sud, le cyprès raconte le chant des cigales. A son pied quelques graminés disséminées dans les bacs ondulent au gré du vent et de leur chevelure carressent le temps.

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dimanche 10 juin 2007

A l'ombre du métal : chantier naval à Alexandrie

Il est temps que j'aille refaire un tour à Alexandrie. Cette ville fascine et surprend. On s'attend à y rencontrer des témoignages de l'époque d'Alexandre, des vestiges multiples de l'Egypte antique... Ils sont pourtant très peu nombreux.
Cela laisse un peu désabusé les touristes tant ils voient en l'Egypte un musée à ciel ouvert.

Et pourtant Alexandrie est un vivier extraordinaire. Elle joue avec le temps, et se renouvelle sans cesse, dans son architecture, dans ses métiers, dans sa passion de la connaissance universelle et du partage.

Le charme ourlé de sa baie, la lumière de ce "phare" sur la Méditerranée, invitent à parcourir la ville, ses ruelles, ses marchés souriants jusqu'aux puanteurs du marché aux poissons.
Un peu plus loin se trouve le chantier naval. L'accès est aisé par la plage. Les ouvriers sont à peine intrigués par un photographe occidental. A l'ombre d'un autre vaisseau, le squelette métallique d'un bateau sera bientôt plus charnu et d'une nouvelle peau prendra la mer.

Cette dentelle de métal jongle avec les effets de lumière et offre la liberté surprenante de baguettes suspendues montant vers le ciel. Cela semble léger, aérien, presque fragile.
Difficile d'imaginer demain la coque solide d'un navire dans le bruit assourdissant des outils qui façonnent la matière.

L'ouvrier traverse avec attention le regard fixé sur les poutrelles et étonne sur l'équilibre incertain du frêle esquiffe, aux contreforts absents sur le côté droit.

Une devanture de magasin "militante" en Egypte

Une devanture de magasin dans la ville d'Alexandrie. Ces petits poupées suscitent la surprise dans cette ville du monde arabe. Je m'arrête. La chaire si souvent cachée en Islam se retrouve dans cette vitrine sur les devants de la scène.

On imagine le marchand qui a disposé ces petits corps. En haut à gauche deux poupées bataillent. D'autres s'enlacent. Se font des bisous. C'est le royaume de l'enfance, de la spontanéité, le clien d'oeil de mains tendues qui saluent le passant d'un jour.

Ce contraste marquant m'invite à prendre la photo. La composition habile du commerçant flirte avec une oeuvre d'art. Elle ne manque pas d'humour et de courage. Un beau message d'ouverture pour tous ces pays où les visages des femmes sont bien souvent absents.