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mardi 4 mars 2008

Rêver et rencontrer Babylone...


Avant d'arriver à Babylone, notre imagination battait la chamade. Nous rêvions de ce nom mythique attaché à l'histoire du monde. Cette rencontre avec cette ville nous semblait presque improbable. C'était pour une partie d'entre nous, un peu comme si un des patriarches de la Bible se présentait devant nos yeux, dans un délire anachronique.
Des images habitaient notre pensée. Celles de tableaux anciens représentant la Tour de Babel. Celles merveilleuses, idéalisées, des jardins suspendus. Celles étranges, toutes pointées vers le ciel, des temples sacrés formant ziggourats.

Aller à Babylone, revenait également à conjuguer les mythes des illustres figures au pluriel. La mort du Grand Alexandre dans les murs de la ville, le 13 juin -323. Il avait 33 ans. La transformation de la Cité par l'inoubliable Nabuchodonosor, qui offrit au monde d'autres joyaux comme la porte d'Ishtar, aujourd'hui à Berlin...

Comme un livre maintes et maintes fois recommandé, nous prenions le risque de tant idéaliser le lieu... que la déception pourrait être au rendez-vous. Il n'en fut rien. Certes il ne reste de la Tour de Babel qu'un immense trou béant. Les Ziggourats ont fondu, éprouvées par l'humidité rongeant leurs briques crues d'argile. Les jardins suspendus furent peut-être construit dans la ville de Ninive, toute proche... Mais d'immenses champs laissent encore deviner les restes adoucis des murs de cette Cité d'exception.


Saddam Hussein fut inspiré par le lieu. Il reconstruisit une partie du palais avec des briques chiffrées à son nom, comme Nabuchodonosor en son temps avait osé inscrire "Moi, Nabuchodonosor j'ai réalisé ce qu'aucun roi n'avait jamais fait..." en lettres cunéiformes sur quelques murailles.
Saddam fit également édifier sur une colline dominant l'Euphrate et la Cité, un des palais dont il avait le secret, et qu'il multipliait aux points cardinaux de sa dictature. Nous n'avions pas l'autorisation de prendre ce cliché. Avec un zoom et quelques ruses j'essayais de saisir cet édifice moderne rompant avec le côté intouchable du lieu.

La luxuriance de la végétation contraste nettement avec le désert si proche et laisse entrevoir ce que fut cette ville hier, carrefour de cultures, de civilisations, à la richesse légendaire.
L'eau si proche avec l'Euphrate, indispensable à la vie conduisit également la ville à sa perte.

L'homme ne pouvait impunément arroser, et arroser encore pendant des siècles sur une terre brûlée par le soleil. L'évaporation laissait sur le sol de multiples sels minéraux. L'irrigation apportait l'eau mais ne lessivait pas la surface comme lors des crues en Egypte. En profondeur, de chlorures en chlorures, la terre devenait impropre à l'agriculture. Ce fut un lent déclin. Il pourrait inspirer des expériences d'irrigation menées aujourd'hui en Libye ou ailleurs.

Les chantiers de fouille restent considérables à Babylone. A la croisée des rues, nous trouvions encore en 1997, des briques portant des cartouches cunéiformes, des restes brisés des murailles en terre cuite vernissée, d'un bleu lapis-lazuli profond... Longtemps encore cette ville fera rêver les hommes. Comme cet après-midi, où nous lisions au bord de l'Euphrate les textes de l'ancien testament dédié à cette capitale. Des phrases si anciennes, presque poétiques, déconnectées du réel, prenaient vie sous nos pieds, enracinant cet ouvrage.

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lundi 3 décembre 2007

Les savons de Baghdad

Nous étions en Irak en 1997, entre les deux guerres du Golfe. Il n'y avait pas grand chose dans les magasins. Les marchandises étaient bloquées par l'embargo américain. C'était un temps avant l'Euro. Un oeuf valait à lui seul plus de 10 FRF. Un prix exorbitant.

Les irakiens vivaient tous mal à cette époque, sous l'autorité de Saddam Hussein. Bien que. Ce devait être finalement plus confortable qu'aujourd'hui. Dans les rues l'accueil était très chaleureux. Quelques touristes, jeunes... cela suggérait la fin du malheur. La réouverture vers le monde. Il en fut tout autre.

Quelques produits me marquaient comme cette échoppe à Baghdad, avec des milliers de savons. Tous les mêmes. Bruns, jaunies, verdâtres... Ces savons nouaient le lien avec l'autre cité mythique d'Alep. Sa formule avait été inventée il y a si longtemps. Bien avant les croisades. Des chevaliers belliqueux découvrirent ses propriétés pour se laver, à une époque où l'hygiène était toute relative en Europe. Ils rapportèrent certains exemplaires, apprirent la fabrication et donnèrent naissance au savon de Marseille.
Brassage des cultures, échanges du Moyen-Orient vers l'Europe, cela conduisait à un peu d'humilité. Bien plus tard les flux s'inversèrent...

Cet irakien nous fit découvrir sa marchandise. Il coupa quelques savons. Marrons à l'extérieur, ils étaient vert émeraude à l'intérieur. Gage de qualité. Garantie de la teneur en huile pure de laurier. La plus noble, la plus parfumée dont les vertus dermatologiques sont démontrées.
Je lui en prenais quelques-uns. Cet homme était heureux de nous vendre quelques produits. Qu'est-il devenu aujourd'hui ?

Il n'y avait vraiment rien dans ces magasins. Je cherchais du détergent pour nettoyer les sanitaires d'un monastère où nous résidions quelques jours au nord de Mossul dans le Kurdistan Irakien. Il était impossible d'en trouver tant cela devait être dangeureux... Les crayons à papier n'existaient pas non plus. Les mines de plomb ou de graphite pouvaient contribuer à construire des armes. Cela semblait surréaliste.

Il s'agissait d'une drôle d'époque. D'armes de destruction, on n'en trouva finalement aucune. Mais presque tous justifièrent une guerre qui préside aujourd'hui à l'atomisation du pays.

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mardi 17 juillet 2007

Irak : en rêve la Tour de Babel

Entre les deux guerres du Golfe, il y a 10 ans nous étions de passage en Irak avec 40 jeunes pour rencontrer les communautés chrétiennes Chaldéennes du pays, leur apporter notre soutien et près d’une tonne de médicaments en pleine pénurie.

C’était une goutte d’eau dans un océan de misère.
Nous avions tous été impressionnés par la richesse des rencontres, l’accueil très chaleureux des communautés à Mossoul, la découverte d’une culture si différente avec toutefois des ponts très étroits entre nos histoires.

Tous ces vestiges chahutés par les bombes… Tous ces sourires illuminant les visages émaciés des enfants, que sont-ils devenus aujourd’hui… Toutes ces images et discussions avec ces populations abandonnées nous marqueront à jamais.

Nous avions l’occasion avec un visa VIP de traverser l’ensemble du pays jusqu’au Kurdistan, zone interdite aux Irakiens.
Près de Babylone, nous passons près de la ville de Samarra et de l’incontournable mosquée d'al-Mutawakkil et de son minaret hélicoïdal de 52 mètres de haut, édifié vers l’année 850 par le calife Jafar al-Mutawakkil.


Nous montons à son sommet. Des chevaux ou mulets pourraient grimper sans problème ces larges marches. Tout en haut la vue est extraordinaire sur le contour imposant des murs de la mosquée.
Et seul face au ciel nous rêvons à la Tour de Babel. Elle est ronde dans notre imaginaire occidental, sans doute à cause des grands voyageurs du Moyen Age qui furent frappés par ce minaret, et de là elle a servi d’illustration à toute iconographie lié au mythe de Babel.

Mais cette illustre tour avait une toute autre forme. Carrée, comme le phare d’Alexandrie, comme les ziggourats visibles à Ur ou à Babylone, dont il faut l’avouer, ne reste aujourd’hui que quelques moignon de briques crues. Tous très émouvants, la paille entre les couches ayant plusieurs milliers d’années. Quand l’éphémère flirte avec l’éternité !

dimanche 25 mars 2007

Elle chante en Syriaque... l'invention de l'écriture

© Collection privée BROCARD II.

Avant-hier, une femme orientale chantait à l'opéra en Syriaque. Cela faisait 10 ans que je n'avais pas entendu cette langue araméenne, presque fossile, dont les sonorités renvoient aux premiers âges du Christianisme. La dernière fois, je la percevais, résonnante, à l'occasion d'une célébration dans une église chaldéenne à Mossoul, grave, martelée par un prêtre au port hiératique. Le mystère des sonorités m'avait subjugué.

La voix pure de la chanteuse, presque un peu voilée, comme la pudeur de ce peuple irakien du nord qui souffre atrocement dans ce conflit larvé entre occident et orient, réveillait en moi le souvenir de ces amis croisés dans la patrie d'Abraham. Que sont-ils devenus aujourd'hui ? À travers ces deux conflits et cette guerre civile qui n'en finit pas ? Nous n'avions pas eu la possibilité d'entretenir les contacts. Mais leurs visages restent gravés dans nos mémoires, comme leur sourire dans ces intenses difficultés.

Syriaque, Araméen, Sumérien... Ces mots sonnent l'écho de notre propre histoire. De découvertes fantastiques. Inventions des cités. De l'écriture. Des religions... 50 siècles d'aventures humaines dans le chaudron Irakien. Qui vibrent dans la Cité de Babylone au bord de l'Euphrate. Les briques crues, cuites, portent les empreintes cunéiformes des grands bâtisseurs comme Nabuchodonosor. Un fragment de pierre rapporté de notre voyage en Irak, m'invitait quelques années plus tard à collecter des petites tablettes en argile auprès d'un collectionneur allemand. Les textes sumériens gravés dans la matière, patinés par le temps, aux sonorités oubliées, s'envolent rejoindre le chant en Syriaque d'hier et nos amis d'Irak aujourd'hui.

Pour en savoir plus :
Syriaque, Cunéiforme, naissance de l'écriture, Babylone