samedi 28 juillet 2007

Invention du lait lyophilisé dans le désert de Mauritanie



La découverte du désert. A perte de vue observer le sable, les dunes, ces courbes parfaites. Ce sentiment d'infini, de perfection. L'impression de l'Unique en ce lieu. D'être soi-même, d'exister car rien ne vient vous perturber. Aucun son, ni aspérités. Tout est fluide.

Tel un enfant je ne pouvais éviter de courir, de monter les dunes, les descendre, glisser sur le sable blond ou ocre, avec le sentiment d'avoir le coeur plein, riche de cette expérience et de cet immense vide.

C'était ma première impression du désert, du vrai, de celui de la Mauritanie. Certes j'avais déjà rencontré les déserts de pierre en Israël, en Jordanie, en Irak, en Turquie, au Yemen... Mais là c'était le royaume sauvage du sable, l'impression d'être seul et d'exister dans l'harmonie hostile du lieu. Magnifique. Grisant. Inoubliable.

D'autres déserts extraordinaires en Algérie, Libye, Egypte, m'offrirent d'autres impressions mais jamais plus cette exitation de la première découverte. Néanmoins je ne me lasse pas du désert. Chaque rencontre avec lui est un moment étonnant toujours plus riche chaque année.

Je me souviens à la lisière des dunes de ces belles femmes aux visages et grain de peau très fin, en train de caresser ces calebasses. Celle de droite en particulier. Les mains grasses des humeurs du chameau, elles polissent la matière, lui donnant un côté luisant, étanche, pour consommer ensuite d'autres liquides.

Les arbres comme l'acacia disparaissent pour la cuisine, le chauffage, ou d'autres ustenciles. Ses teintes foncés et claires dessinent des veines surprenantes sur la courbe des objets. Mais le bois n'est presque plus. Ces calebasses sont usées, anciennes, presque un souvenir d'un autre temps. Leurs contours sont émoussés par tant de lèvres. Hier encore des enfants goûtait le lait de chamelle grâce à elles.

Ce lait ne se conserve pas. Il ne caille pas. Peu nombreux sont ceux ayant réussi à en faire du fromage. Dés lors on se demande comment les nomades du désert pourraient le garder pour le consommer un peu plus tard...

Pas de poche, hormis les peaux pour l'eau. Bref pas de récipient. L'utile est ailleurs. La créativité prend le relais. Ce qui semblerait extravagant chez nous prend içi forme.

Vous ne pouvez pas conserver le lait ? Et bien jetez le. Par terre. Dans le sable. Malaxer le comme une pâte. Former presque un château de sable, une brique dense à ensuite faire sécher au soleil. Elle durcit. Devient cohérente, ferme et bien solide. Voilà c'est fait, le lait est conservé.

Demain, dans un mois ou six, il suffira de mettre cette brique dans la calebasse, de rajouter de l'eau. Le lait remplira la cavité et le sable tombera au fond. Avec une créativité inoui les Touaregs ont inventé le lait lyophilisé.

Je rapportais cinq calebasses de Mauritanie pour en offrir quelques-unes à mes proches.
Celle de gauche vient du Yemen. Je la trouvais un soir dans le fourbis d'un magasin de la capitale de Sanaa. Son grain, les couches de patine jettent un voile d'ombre sur le bois brut.
Elle fut réparée bien avant avec quelques nouveaux morceaux de peau en métal, faisant penser à cette exposition au Musée du Quai Branly sur ces objets d'hier, rafistolés pour démarrer une nouvelle vie.

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