lundi 28 janvier 2008

Vivre dans une mosquée de Rosette en Egypte

Face à l'entrée de cette mosquée de la petite ville de Rosette, au pays des Pharaons, nous imaginons quelques merveilles à l'intérieur. La porte date du XVIIIe siècle. Une époque florissante en Egypte, dont quelques maisons de la ville témoignent avec éclat. Mais ce n'est encore rien face aux trésors récupérés, mis en scène à l'intérieur du bâtiment. En avant. Passons le pas de la porte.
Des enfilades de colonnes soulignent la perspective de la salle. Elles donnent de la hauteur, s'élancent vers le ciel telles les prières des hommes de foi, invite l'âme humaine à s'élever... Seulement ces colonnes ne furent pas taillées pour ce lieu de culte. Elles ornaient des édifices à des époques bien plus lointaines. Chapiteaux corinthiens, doriques, soulignent la grande antiquité de ces sculptures. La "ré-invention", le recyclage de ces matériaux permit de les préserver et de nous les offrir aujourd'hui mis en valeur dans cette mosquée.


Un homme dort, deux autres discutent tranquillement sous la lumière et la douce chaleur de ce mois de décembre 2007. Les chaussures sans doute un peu plus précieuses que d'autres laissées à l'entrée ponctuent la composition. Cette scène de vie m'amuse et me semble si en décalage avec la grande retenue qui règne dans nos églises. Si lointaine des cathédrales du moyen âge, où le lieu de culte était un espace de rencontre, d'échange, de partage, de commerce même. Comme ici il n'y avait pas de chaise. On s'y rencontrait simplement.

Un homme généreux, un homme sec. Deux visions différentes de la vie se présentent. L'un des fronts apparaît sourcilleux, comme le drapé complexe de sa djellaba, et nourrit une pensée rythmée par l'égrenage du chapelet. Cahin-caha, l'autre bonhomme avance. Un sourire s'esquisse sur son visage, aussi lisse que le tombé de son vêtement. C'est un autre choix. Une autre autre approche de l'existence. Elles vont bientôt se rencontrer et dialoguer un instant ensemble.
Autre vue de ce trio. Trois individus. Trois situations. Sommeil. Discussion. Prière... Autant de notions si proches les unes des autres. L'analyse de l'électro-encéphalogramme des bouddhistes ou de soeurs carmélites, souligne la proximité de l'état de prière avec celui du sommeil. Un clin d'oeil visuel et un jeu de correspondance au sein de cette mosquée.

lundi 21 janvier 2008

Des chants du Yemen tissent des liens entre nos peuples


Un soir je me souviens, nous étions égarés dans la montagne, au bord d'un village. Nous avions marché toute la journée sur ces hauts plateaux du Yemen. Les 4x4 ne pouvaient nous suivre et avaient contourné tout le massif. Mais ils n'arrivaient pas. Le soir commençait à tomber ainsi que le froid et nous n'avions pas de ravitaillement,

Finalement nous décidions de ne pas nous en faire et d'attendre en chantant. Des enfants nous rejoignirent. Nous ne parlions pas leur langue. Ils riaient tant et plus devant les intonations des mélopées françaises. J'accentuais un peu ma voix pour impulser plus de rythmes encore me rappelant nos années scoutes.

Puis nous nous arrêtons. Et si finalement ils nous entonnaient quelque chose aussi ? Spontanément, d'un geste nous les invitons à chanter à leur tour. Ils comprennent et de leurs petites voix timides, tout d'abord, nous font entendre un chant venu d'ailleurs. Nous applaudissons. C'est à notre tour maintenant. Et nous voilà dans une sorte de Mondio-vision à alterner les chansons entre France et Arabie.

Cela dura toute la soirée autour du feu. Puis nos 4x4 arrivèrent. Les parents vinrent rechercher leurs enfants en camion. Il était tard. Mais plus le camion s'éloignait, plus les enfants s'échappaient pour revenir vers nous. Cette soirée fut étrange. Par des regards, des chants, si peu de choses, nous avions tissé des liens entre nos peuples.

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samedi 19 janvier 2008

N'oublions pas les Hommes de l'Hadramaout au Yemen

Yemen 2000 : un vieillard au pied des portes de la ville dans l'Hadramaout

Hier les médias annonçaient la mort de deux Belges et deux Yemenites, abattus dans la région de l'Hadramaout, au Yemen. Cet évènement terrible m'évoqua un voyage de plus de 20 jours dans ce pays l'été 2000.
Yemen 2000 : un marchand au turban déclinant la couleur de ces épices,
marché du sud

Ce fut l'occasion de rencontrer un peuple fier, accueillant et terriblement armé avec une moyenne de 3 armes par habitant, protégé également par ses montagnes et hauts plateaux.

Yemen 2000 : un père et un fils en arme,
pioche d'un côté et kalachnikov de l'autre


Lors des mariages retentissent des tirs de kalachnikov, marquant la joie et l'enthousiasme des invités à la noce.

Yemen 2000 : hauts plateaux près de Sanaa

Ce jeune homme est très fier de sa vache, richesse dans cette région montagneuse du pays, où jusqu'à 3000 mètres d'altitude, s'élèvent des terrasses cultivées grandes comme de petits carrés potagers.

Yemen 2000 : marché du sud du pays -
correspondance du blanc des yeux et des goulots des calebasses

Sur ce marché, ils mettent les poules dans ces superbes paniers tressés. Quand je pense à nos cages bien tristes, face au travail minutieux de ces artisans.

Yemen 2000 : tout est tressé,
de la bouche du chameau aux paniers pour les poules


Nous pûmes traverser tout le pays excepté le Yemen du Nord, jouxtant l'Arabie Saoudite. L'accueil fut partout sympathique, accompagné de nos guides, avec toutefois des contrôles, ou "péages" spontanés pour traverser certaines pistes du désert. Les femmes sont vêtues de bourka au Nord et très librement habillées de couleurs chatoyantes au nord.

Yemen 2000 : marché du sud,
étonnante broderies jumelles d'un rouge éclatant nuancées de pourpre


Le contraste entre la culture du sud du pays et celle du nord est frappant. Ici les femmes acceptent volontiers d'être prises en photo. Elles sont visibles, charmantes, enveloppées d'étoffes brodées, ou plus colorées les unes que les autres.

Yemen 2000 : les couleurs chatoyantes ne sont pas sur les étales
mais bien plus sur les visages des femmes


Nous ne sommes pas très loin de l'Afrique. A quelques centaines de kilomètres se trouve l'Ethiopie. On observe une grande influence africaine. Les maisons de pierre du nord ont cédé la place à des cases. Il faut avouer que la température n'est pas la même. 20°c sur les plateaux, et plus de 40°c au bord de l'Océan Indien.

La femme ci-dessous est toute seule face à 4 hommes. Un petit sourire délicat orne son visage. Ils plaisantent ensemble. On peut sentir une grande timidité et un respect mutuel.

Yemen 2000 : marché du sud, sourire, humilité et respect de chacun
dans cette discussion autour d'un achat


Ce pays ne fut jamais conquis dans son histoire. Les villes griment les montagnes, ressemblent à s'y méprendre aux falaises et disparaissent dans les brumes des sommets vers les 3000 mètres d'altitude.

Yemen 2000 : hauts plateaux près de Sanaa, village à 3000 m,
les murs sont sobres, mais une dentelle de chaux illumine la façade


Le village ci-dessous est perdu au plus haut d'une montagne. Il n'existe pas de sources pour l'alimenter en eau. Des citernes sont construites sur la grande place. Des murailles encadrent le lieu. Ils pouvaient ainsi vivre en autarcie plusieurs mois.
Ces villages étaient abandonnés depuis longtemps. Le soutien du Yemen à l'Irak de Saddam, conduisit l'Arabie Saoudite à chasser les Yemenites de son pays. Ils furent des millions à ré-investir les montagnes pour trouver un toit, retrouver un travail et finalement exploiter la terre et redonner vie à ces maisons rares du Moyen-Age.

Yemen 2000 : ville de l'Hadramaout, au pied des falaises

C'est en route vers ces vallées que l'Hadramaout que les touristes Belges furent tués. Dans ces canyons, se nichent des petites villes, protégées par les falaises. Ce sont de petits paradis avec l'eau qui coule en hiver dans un lit de cailloux qui l'été sert de route. De magnifiques demeures existent sur place, contruites par des familles ayant fait fortune dans les pays du Golfe. Ils rénovent ainsi les palais de leurs ancêtres.
Des hôtels étaient en projet lorsque nous sommes passés l'été 2000. Peuvent-ils encore servir aujourd'hui ?


Yemen 2000 : ville de l'Hadramaout,
des palais aux centaines fenêtres se distinguent


Nous avons été assaillis par les moustiques toute la nuit. Des nuées de centaines de bestioles contre lesquelles il était bien difficile de se protéger. La Nivaquine était consommée avec attention par l'ensemble de notre petit groupe. Nous mettions nos visages derrière le tissu des sacs à viande, qui n'offraient finalement qu'une bien misérable protection.

Yemen 2000 : même très jeunes,
ils portent déjà la Jambia avec fierté


Aujourd'hui le monde va mal. De plus en plus. Je me rends compte que tous ces pays visités dans le monde arabe, années après années, sont de moins en moins accessibles. Les hommes, les religions, sont de plus en plus opposés les uns aux autres.

Il n'est plus question de mettre les pieds en Irak. La Mauritanie n'a pas pu protéger il y a quelques semaines quelques touristes. La Palestine et la Bande de Gaza sombrent dans le chaos. Le Niger et toute la région autour d'Agadez n'est plus recommandée, ni accessible. Et voilà le Yemen à son tour qui s'enfonce à nouveau dans l'ombre.

Yemen 2000 :ce vieux marché du haut Moyen-Age est fermé,
se transforme et accueille les bêtes

Que s'est-il passé pour en arriver là ? Quelle responsabilité avons-nous en tant qu'occidentaux ? J'y vois l'échec terrible des politiques étrangères arrogantes, de l'incompréhension d'autres cultures.

Yemen 2000 : les garçons se prêtent volontiers au jeu de la photo
mais écartent les filles qui cachent leurs visages


Je reste circonspect, face aux aux logiques tribales, différentes de nos démocraties mais si éprouvées en tant que système politique plusieurs fois millénaires.
Je ne peux que constater un certain mépris des peuples face à des enjeux économiques injustifiables dans les désastres humains qu'ils entraînent.

Yemen 2000 : les routes sont rares dans le pays,
rien ne vaut les chemins muletiers entretenus depuis des temps immémoriaux


A l'image de l'appel de Jean d'Ormesson que pouvons-nous faire pour changer cela ? En allant plus loin. Mais au delà d'une seule confession ?

Regardez tous ces visages sur ces photos. Il ne s'agit que d'un vieillard, d'adultes et de jeunes enfants au Yemen. Peut-on jeter l'opprobre sur ces populations ? Certes non. Gardons des liens, visitons ces pays, et surtout ne les oublions pas.

Yemen 2000 : un pas de porte à Shibam, véritable Manhattan du désert,
la chèvre attend de jouer avec les enfants


Pour en savoir plus ?
De magnifique photos à découvrir sur le blog de Joël Dousset
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vendredi 18 janvier 2008

Un bijou carrefour de civilisations

Cet objet souligne la rencontre de différents univers. La pierre a été travaillée, polie, lustrée par des années d'usage. Elle fut une hache, outil ou objet votif des peuples disparus du Sahara.

Des millénaires après le néolithique, la finesse du grain invite un artisan Touareg à la sertir. Une autre culture nomade offre une nouvelle vie à l'objet. L'objet devient presque carrefour de civilisation, machine à remonter le temps.

Argent, et cuivre jaune enserrent la hache dans un jeu complexe de motifs géométriques. L'ensemble suggère comme un petit personnage doté d'une tête en forme de boucle, d'un buste ciselé, d'un large boubou sombre marqué par la pierre. Au dos figurent des caractères Tamatchek accompagnés d'une étoile à 6 branches.

L'objet a quitté le monde des outils et s'affiche désormais comme un bijou doté d'une dimension supplémentaire, symbolique, comme un gri-gri avec une portée magique.

Une combinaison de symboles, des interactions sur des millénaires, des correspondances entre peuples nomades... Autant d'éléments porteur de sens, donnent de la profondeur à cet objet. Je n'hésitais plus et proposais d'acheter ce bijou porté par un Touareg dans les rues d'Agadez.

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mardi 15 janvier 2008

L'appel du désert en Mauritanie


Aujourd'hui la Mauritanie se ferme peu à peu aux étrangers. Il y a presque 7 ans, cette partie du Sahara fut mon premier désert de sable, à l'infini.
Ce jour là, je suivais notre guide, en tête.

Je fus fasciné par ces dunes galbées, ourlées par les ombres du soir. Je fus aspiré par ces premiers pas juste devant moi, face à l'immensité. Je fus happé par ces creux révélant tous les trésors du Sahara, gardés dans leur écrin de sable depuis des millénaires : silex taillés, coquille d'autruche, tessons de poteries...

Aujourd'hui quand je revois cette photo, ces espaces intactes, retentit l'appel du désert... Puissent les peuples nomades continuer d'accueillir sur leurs terres.

vendredi 11 janvier 2008

Jeux de pierre au Sahara

Le Sahara réserve de multiples surprises, cache des joyaux dans les massifs les plus reculés. Certains sont des créations humaines comme les peintures présentées hier. D'autres rassemblent des espèces endémiques emprisonnées depuis des millénaires dans une guelta, comme au Tchad avec les crocodiles miniatures.

Sur cette photo, c'est tout simple, tout autre. Nous n'avons que la pierre brute, mais quelle pierre. Des couches sédimentaires juxtaposées en vagues aléatoires. Des oxydes complexes, jaune, rose, rouge, bleu, blanc, orange alternent entre eux, joue avec notre regard, développent une composition étonnante.

Miracle de la nature. Subtilités des couleurs. Je fus fasciné par cette oeuvre du grand Artiste, abandonnée dans le Sahara Libyen. Des années plus tôt, j'observais des teintes comparables à des kilomètres de là dans les monuments funéraires de Petra.

mercredi 9 janvier 2008

Les oeuvres d'art préhistoriques des peuples nomades du Sahara

Dans cette grotte du Sahara, cet homme rouge vous accueille depuis plus de 6000 ans. Il est également une invitation à découvrir d'autres peintures rupestres photographiées en Libye il y a quelques années, sur un parcours de plus de 140 km. Sont-elles répertoriées ? Ont-elles donné lieu à des études plus approfondies ? Difficile de le savoir. Visite en couleur chez un peuple de pasteurs.

Les yeux sont absents, les paumes ouvertes, le mouvement des bras évoque les pattes d'une grenouille. La disposition des genoux suggère une vue de dos. Blanc, jaune, ocre, ce trio de couleurs offre une certaine présence à ce chaman, invoquant peut-être les esprits.

Autre époque, autre style. La grande finesse d'exécution de ces bovins dans leurs robes rouge et blanche renforce le mouvement d'ondulation du pas du troupeau.

Quelques moisissures grignotent du terrain sur ces peintures d'une autre race de bovidés. Les cornes sont élancées comme les ailes d'un aigle. L'artiste affine le trait. On peut distinguer les chairs du cou, l'effet galbé des pattes, le mouvement d'une oreille...


Immenses corps allongés. Juste un bras en guise d'au revoir. L'autre semble replié derrière une toge stylisée en forme de vague ocre. Il y a une dimension hiératique, un port altier, une figure fière. La peau semble blanche au coeur de cette Afrique. Nous sommes des millénaires en arrière. C'est étrange. Troublant. Comme un peuple perdu, oublié, ils vous saluent au passage.

Les formes rondes ont cédé la place à des effets géométriques plus marqués. Les lignes du corps sont habiles sur l'animal de gauche. Le train arrière plus petit donne comme un effet de perspective bien longtemps avant notre Moyen-Age.

Les teintes blanches s'effacent et laissent progressivement la place à la pierre. Elles témoignent encore du talent de cet artiste anonyme. Il a joué avec la matière et une seule couleur, invitant la teinte du fond à dessiner les tâches de la robe.

Simplicité extrême des formes. Ces hommes sans bras, aux jambes démesurées, expriment comme la prédominance de la marche, mouvement essentiel pour un peuple nomade. C'est minimaliste et porteur du message d'itinérance.


J'admire le mouvement des cornes de gauche. Une parenthèse sur un autre monde oublié. Un clin d'oeil blanc subtil à l'autre bovidé de droite.


Dans la transparence de la peau de l'animal de gauche on devine les angles dessinés par les hanches et un travail de perspective au niveau du pis . La tête est minuscule, comme les pattes. Seul le corps semble mis en avant, comme une valeur porteuse, comme un élément nourricié intéressant, à l'image des oeuvres aux rayons X de nos cousins d'Australie.

Vétues de robes, la croupe bien arrondie, un sorte de châle autour du cou, armées de leurs calebasses, ces femmes tiennent un concert. On entend une musique d'avant l'écriture, balancée par un rythme entraînant. Un maître de cérémonie sur la droite, est coiffé d'un masque avec quelques plumes d'autruche. La forme devant lui, mystérieuse apparait comme de même facture. On y devine un corps allongé, le corps distendu, un ventre important. S'agirait-il d'un accouchement ?

Le niveau atteint par cette oeuvre est tout à fait remarquable. Il n'y a plus rien de primitif. Les formes sont d'une extrême finesse. Observez l'ourlet dessiné par la queue.

Un animal allongé sur la gauche, d'autres en mouvement ou simplement posés comme en surimposition, les effets s'ajoutent, les époques se confondent, comme dans un élan créatif incontrôlable. Au milieu du beuglement des bovins deux hommes marchent d'un pas alerte mais curieusement regardent an arrière, dans un effet de contradiction surprenant.

Gravures, peintures, pochage, la couleur ocre domine. Les troupeaux furent nombreux à cet endroit. Cet Akkakus Libyen dut être une zone réputée de pâturage. Je reste surpris à nouveau par les figures géométriques qui habillent le ventre de l'animal central. Figures cabalistiques, itinéraire d'un peuple, marque de propriété, traits de coupe sacrés de la viande... Le mystère persiste.

Le maître et son plus fidèle allié, le chien, cela dure depuis plus de 17 000 ans. L'homme ici est sans doute beaucoup plus jeune. A peine a-t-il quelques milliers d'années, autour du temps du Néolithique. Le mouvement est ample, aérien, on imagine qu'il interpelle un troupeau imaginaire armé de son bâton. Il semble vêtue d'une simple tunique à l'image des égyptiens des années plus tard. Son visage, sa tête est absente, seul le corps nous parle.

La figure centrale me fait penser à des représentations d'autres tassilis, présentées par l'explorateur et archéologue Henri Lhote : les têtes rondes. Une dimension plus cérébrale, presque spirituelle se construit dans cette large boite crânienne.

Cette girafe blanche joue avec la teinte bleue de la pierre et semble ainsi traverser une rivière, ses pattes à demi estompées par l'onde froide.

Absence de perspective dans ce petit bouquetin. La corne des sabots n'a volontairement pas été peinte en rouge. Cerclée d'un fin liseret ocre elle adopte la couleur brute de la pierre.
Cet animal devait être vénérable tant son buste a été relevé par une toison blanche abondante, partant de la tête, et soulignant les lignes du corps jusqu'à l'arrière train.


Quel mouvement. Nous sommes des observateurs privilégiés de cette chasse aux bouquetins et autres félins. Les jambes de l'homme sont graciles comme à peine perceptibles dans le feu de la course.

Les girafes sont aujourd'hui si loin de ce désert, à des milliers de kilomètres. Celle-ci est restée sur cette paroi, seule, unique dans sa robe tâchée de fine billes orangées. Le jeu croisé de ses pattes imprime comme un mouvement à la figure. Une sorte de dynamique éternelle et gracieuse.

Fin de la série sur ce périple en Libye. Ce fut un des plus beaux parcours au Sahara. Un voyage exigeant avec 8 heures de marche. L'occasion de vivre et rencontrer le pays comme les nomades et pasteurs d'hier.

Le saviez-vous ? En cliquant sur les photos, dans chaque nouvelle du blog, vous avez la possibilité de les agrandir, et d'y observer plus de détails.


mardi 8 janvier 2008

Ivresse du désert de Libye

Avez-vous déjà ressenti cette ivresse du désert ? Un enthousiasme brûle votre ventre, donne des ailes à vos pieds. Captive votre regard, gourmand, insatiable, face à ces immenses espaces, pendant des heures sans aucune lassitude. Les sens sont en alerte...

Passer la main dans le sable, chaud en surface, puis plus frais et enfin très légèrement humide à quelques centimètres. Se laisser tomber, comme un tonneau. S'abandonner. Mouvement du corps, roule et roule jusqu'au pied de la dune. Descendre de la crête, vite, plus vite, pour précéder la coulée de sable qui accélère. Ecouter le chant des éléments, de ces milliards de grains qui rouspètent...

Les impressions sont multiples. Le premier désert, comme un premier baiser, reste inoubliable. Une rencontre marquante qui éveille et invite à bien d'autres RDV.

Je regarde le sol, fasciné par les mouvements imprimés par le sable. Vue du ciel, vue de terre, on ne sait. Le plus petit grime l'immensité. Sans échelle les mètres se fondent en kilomètres et nous pourrions chausser nos bottes de géant.


Contraste des lieux. Ombre et clarté. Surface lisse et crènelée soulignent une ligne sinueuse presque parfaite.


Le sable livre ses mystères. Un chaman en transe y verrait des hordes de serpents. Je comprends ces artistes aborigènes qui en d'autres lieux lisent le sol.


Et tout à coup, face aux caprices du vent, une ride se termine. Abandon d'une ligne de vie...



Les sommets plus lointain de l'Akkakus sont repris sur cette dune. Le grand Artiste les dessine, arrête son oeuvre, laisse le sable reprendre une forme plane, puis reprend ses caprices...


Il y a du volume, de la matière, des rondeurs se dégagent de la partie gauche puis s'adoucissent.



Sable ou tableau, je ne sais plus. Eclairs. Sinuosités. J'aurais aimé l'inventer sur une toile.


Le vent contourne la falaise, s'engouffre dans les creux. S'élève sur ces premières dunes et répète, révèle tel un mirage les massifs tout autour.

Du creux, vers la cime, les formes s'aiguisent, deviennent de plus en plus tranchées, dans les contrastes du soir.


Jeux des teintes du sable, du gris cendré, jusqu'au blanc nacré de lignes d'écume. Les océans se rencontrent.

P.S. : Ces photos furent prises en 2004 lors d'un Trek en Libye, dans le massif de l'Akkakus au Sahara. Je les retrouvais stockées sur CD, à l'occasion du déménagement de mon bureau et ne puis attendre pour les partager, face à cette soif du désert.

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