Dans cette grotte du Sahara, cet homme rouge vous accueille depuis plus de 6000 ans. Il est également une invitation à découvrir d'autres peintures rupestres photographiées en Libye il y a quelques années, sur un parcours de plus de 140 km. Sont-elles répertoriées ? Ont-elles donné lieu à des études plus approfondies ? Difficile de le savoir. Visite en couleur chez un peuple de pasteurs.
Les yeux sont absents, les paumes ouvertes, le mouvement des bras évoque les pattes d'une grenouille. La disposition des genoux suggère une vue de dos. Blanc, jaune, ocre, ce trio de couleurs offre une certaine présence à ce chaman, invoquant peut-être les esprits.
Autre époque, autre style. La grande finesse d'exécution de ces bovins dans leurs robes rouge et blanche renforce le mouvement d'ondulation du pas du troupeau.
Quelques moisissures grignotent du terrain sur ces peintures d'une autre race de bovidés. Les cornes sont élancées comme les ailes d'un aigle. L'artiste affine le trait. On peut distinguer les chairs du cou, l'effet galbé des pattes, le mouvement d'une oreille...
Immenses corps allongés. Juste un bras en guise d'au revoir. L'autre semble replié derrière une toge stylisée en forme de vague ocre. Il y a une dimension hiératique, un port altier, une figure fière. La peau semble blanche au coeur de cette Afrique. Nous sommes des millénaires en arrière. C'est étrange. Troublant. Comme un peuple perdu, oublié, ils vous saluent au passage.
Les formes rondes ont cédé la place à des effets géométriques plus marqués. Les lignes du corps sont habiles sur l'animal de gauche. Le train arrière plus petit donne comme un effet de perspective bien longtemps avant notre Moyen-Age.
Les teintes blanches s'effacent et laissent progressivement la place à la pierre. Elles témoignent encore du talent de cet artiste anonyme. Il a joué avec la matière et une seule couleur, invitant la teinte du fond à dessiner les tâches de la robe.
Simplicité extrême des formes. Ces hommes sans bras, aux jambes démesurées, expriment comme la prédominance de la marche, mouvement essentiel pour un peuple nomade. C'est minimaliste et porteur du message d'itinérance.
J'admire le mouvement des cornes de gauche. Une parenthèse sur un autre monde oublié. Un clin d'oeil blanc subtil à l'autre bovidé de droite.
Dans la transparence de la peau de l'animal de gauche on devine les angles dessinés par les hanches et un travail de perspective au niveau du pis . La tête est minuscule, comme les pattes. Seul le corps semble mis en avant, comme une valeur porteuse, comme un élément nourricié intéressant, à l'image des oeuvres aux rayons X de nos cousins d'Australie.
Vétues de robes, la croupe bien arrondie, un sorte de châle autour du cou, armées de leurs calebasses, ces femmes tiennent un concert. On entend une musique d'avant l'écriture, balancée par un rythme entraînant. Un maître de cérémonie sur la droite, est coiffé d'un masque avec quelques plumes d'autruche. La forme devant lui, mystérieuse apparait comme de même facture. On y devine un corps allongé, le corps distendu, un ventre important. S'agirait-il d'un accouchement ?
Le niveau atteint par cette oeuvre est tout à fait remarquable. Il n'y a plus rien de primitif. Les formes sont d'une extrême finesse. Observez l'ourlet dessiné par la queue.
Un animal allongé sur la gauche, d'autres en mouvement ou simplement posés comme en surimposition, les effets s'ajoutent, les époques se confondent, comme dans un élan créatif incontrôlable. Au milieu du beuglement des bovins deux hommes marchent d'un pas alerte mais curieusement regardent an arrière, dans un effet de contradiction surprenant.
Gravures, peintures, pochage, la couleur ocre domine. Les troupeaux furent nombreux à cet endroit. Cet Akkakus Libyen dut être une zone réputée de pâturage. Je reste surpris à nouveau par les figures géométriques qui habillent le ventre de l'animal central. Figures cabalistiques, itinéraire d'un peuple, marque de propriété, traits de coupe sacrés de la viande... Le mystère persiste.
Le maître et son plus fidèle allié, le chien, cela dure depuis plus de 17 000 ans. L'homme ici est sans doute beaucoup plus jeune. A peine a-t-il quelques milliers d'années, autour du temps du Néolithique. Le mouvement est ample, aérien, on imagine qu'il interpelle un troupeau imaginaire armé de son bâton. Il semble vêtue d'une simple tunique à l'image des égyptiens des années plus tard. Son visage, sa tête est absente, seul le corps nous parle.
La figure centrale me fait penser à des représentations d'autres tassilis, présentées par l'explorateur et archéologue Henri Lhote : les têtes rondes. Une dimension plus cérébrale, presque spirituelle se construit dans cette large boite crânienne.
Cette girafe blanche joue avec la teinte bleue de la pierre et semble ainsi traverser une rivière, ses pattes à demi estompées par l'onde froide.
Absence de perspective dans ce petit bouquetin. La corne des sabots n'a volontairement pas été peinte en rouge. Cerclée d'un fin liseret ocre elle adopte la couleur brute de la pierre.
Cet animal devait être vénérable tant son buste a été relevé par une toison blanche abondante, partant de la tête, et soulignant les lignes du corps jusqu'à l'arrière train.
Quel mouvement. Nous sommes des observateurs privilégiés de cette chasse aux bouquetins et autres félins. Les jambes de l'homme sont graciles comme à peine perceptibles dans le feu de la course.
Les girafes sont aujourd'hui si loin de ce désert, à des milliers de kilomètres. Celle-ci est restée sur cette paroi, seule, unique dans sa robe tâchée de fine billes orangées. Le jeu croisé de ses pattes imprime comme un mouvement à la figure. Une sorte de dynamique éternelle et gracieuse.
Fin de la série sur ce périple en Libye. Ce fut un des plus beaux parcours au Sahara. Un voyage exigeant avec 8 heures de marche. L'occasion de vivre et rencontrer le pays comme les nomades et pasteurs d'hier.
Le saviez-vous ? En cliquant sur les photos, dans chaque nouvelle du blog, vous avez la possibilité de les agrandir, et d'y observer plus de détails.
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